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Publié le 1 septembre 2013 par Soulier Avocats

Appréciation de la faute grave privant l’agent commercial de son droit à indemnité

Le statut de l’agent commercial fait décidément couler beaucoup d’encre !

Après s’être prononcée récemment sur la détermination du lieu d’exécution du contrat d’agent commercial,[1] la Cour de cassation se penche sur la notion de faute grave privant l’agent de son droit à indemnité compensatrice. 

En effet, l’article L.134-12 du Code de commerce prévoit que lors de la cessation de ses relations avec le mandant, « l’agent commercial a droit à une indemnité compensatrice en réparation du préjudice subi ». 

La faute grave est cependant de nature à priver l’agent commercial de son droit à indemnité, en application de l’article L.134-13 du même code. 

Dans son arrêt du 9 juillet 2013,[2] la Cour rappelle que la faute grave est celle qui porte atteinte à la finalité commune du mandat d’intérêt commun et rend impossible le maintien du lien contractuel.[3] Cela étant réaffirmé, c’est au cas par cas que les juridictions du fond doivent apprécier si la faute en cause revêt un caractère de gravité tel qu’il prive l’agent commercial de son droit à indemnité. 

En l’espèce, une société ayant mis fin au contrat l’unissant à un agent commercial, ce dernier l’a assignée en paiement d’une indemnité de commission et d’une indemnité compensatrice.

Saisie une première fois, la Cour d’appel avait considéré que le non-respect d’objectifs commerciaux fixés par les parties ne pourrait, en soi, constituer une faute grave de l’agent commercial et avait en conséquence accordé une indemnité compensatrice à l’agent. 

Elle avait alors été censurée par la Cour de cassation, selon laquelle la Cour d’appel n’avait pas recherché si les faits invoqués par le mandant étaient de nature à caractériser une faute grave, alors que le mandant avait notamment attiré l’attention de l’agent sur la non réalisation de l’objectif fixé et sur la gravité de la situation qui mettait en péril la survie de la chaîne. 

Saisie une seconde fois sur renvoi après cassation, la même Cour d’appel avait alors retenu l’existence d’une faute grave, résidant non pas dans la seule absence de réalisation des objectifs mais dans le fait que le chiffre d’affaires apporté au mandant était d’une faiblesse telle qu’il était de nature à mettre en péril la survie de la chaîne exploitée par la société. 

Par ailleurs, la Cour d’appel avait retenu que l’agent commercial n’avait pas indiqué les diligences accomplies en exécution de son contrat ni les difficultés rencontrées justifiant ses faibles résultats et qu’il n’avait pas amélioré sa pratique après que le mandant lui ait exposé les graves difficultés qu’un faible résultat faisait courir à la survie de la chaîne. 

L’agent commercial a alors formé un nouveau pourvoi. 

Pour la Cour de cassation, la Cour d’appel n’a cette fois pas caractérisé de manquement précis et concret de l’agent commercial à ses obligations, manquement qui remplirait les conditions de la faute grave. 

De plus, elle retient qu’il appartient au mandant d’établir la faute de l’agent. 

La position de la Cour de cassation est difficile à saisir : soit la Cour d’appel ne retient pas la faute grave et elle censurée pour n’avoir pas suffisamment exposé en quoi le comportement de l’agent n’est pas constitutif d’une faute grave, soit elle retient la faute grave et elle est également censurée pour ne pas l’avoir suffisamment caractérisée.

Il faut donc être prudent dans l’appréciation de la faute grave et être en  mesure de démontrer quels faits concrets et précis constituent des manquements de l’agent commercial à ses obligations, et en quoi ceux-ci portent atteinte à la finalité commune du mandat et rendent impossible le maintien du lien contractuel.

 


[1] Cass. Com., 14 mai 2013, n°11-26.631 : la Cour de cassation, amenée à trancher la question de la juridiction territorialement compétente relativement à un contrat d’agent commercial, devait à cet effet se prononcer sur le lieu d’exécution du contrat d’agent. Cf. notre e-newsletter de juin 2013

[2] Cass. Com., 9 juillet 2013, n°11-23.528. 

[3] Déjà en ce sens, Cass. Com., 15 octobre 2002, n°00-18.122.