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WLG Whistleblower Guide 2024 – Chapitre France

Le Chapitre France du WLG Whistleblower Guide 2024 propose un aperçu synthétique des obligations applicables en matière de création et de mise en œuvre de dispositifs d’alerte interne en droit français.

La version originale du Chapitre France du WLG Whistleblower Guide 2024 a été rédigée dans le cadre de l’édition d’un guide multi juridictionnel en langue anglaise consacré au statut de lanceur d’alerte en entreprise, réalisée sous l’égide du World Law Group, réseau international non-exclusif de grands Cabinets d’avocats indépendants rassemblant plus de 21.000 avocats à travers le monde.

Elaboré sous la forme d’un Q&A, ce Guide vise à apporter des réponses concrètes aux principales problématiques susceptibles de se poser dans le cadre de la création et de la mise en place d’un dispositif d’alerte interne dans les principaux pays à travers le monde.

La version anglaise originale du Chapitre France, ainsi que les chapitres des autres pays contributeurs, sont disponibles sur une page dédiée du site du World Law Group (disponible en langue anglaise uniquement).

Une traduction française du Chapitre France est proposée ci-dessous.

2024 WLG Whistleblower Guide : France

Auteurs : Claire Filliatre et Jean-Luc Soulier

Existe-t-il une loi qui protège les lanceurs d’alerte ? Si oui, laquelle ?

Oui, les lanceurs d’alerte en France bénéficient d’une protection légale instaurée par :

  • La Loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016 (dite Loi Sapin II), relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique,
  • La Loi n° 2022-401 du 21 mars 2022 (dite Loi Waserman), qui transpose la Directive européenne sur les lanceurs d’alerte et renforce leur protection.

Les entreprises ont-elles l’obligation légale de mettre en place un dispositif d’alerte interne ?

Oui, certaines entreprises ont l’obligation légale de mettre en place un dispositif d’alerte interne en vertu de ces Lois.

Quelles entreprises sont concernées par cette obligation (nombre de salariés, chiffre d’affaires, secteur d’activité) ?

L’obligation de mettre en place un dispositif d’alerte interne s’applique aux entreprises de 50 salariés et plus, quel que soit leur secteur d’activité.

Sous quelles formes un dispositif d’alerte interne peut-il être mis en place (écrit, oral, e-mail, outil électronique) ?

Le dispositif d’alerte interne doit permettre des signalements confidentiels par différents canaux, notamment :

  • Signalement écrit (ex. : courrier).
  • Signalement oral (ex. : ligne téléphonique dédiée).
  • Signalement via une plateforme numérique sécurisée ou un système de messagerie électronique.
  • À la demande du lanceur d’alerte, un entretien en personne dans un délai raisonnable.

Les lanceurs d’alerte peuvent également choisir d’utiliser un canal de signalement externe et adresser leur signalement directement aux autorités compétentes (ex. : autorités administratives françaises désignées, autorités judiciaires françaises, institutions, organes ou organismes compétents de l’Union européenne, etc.) ou, dans certains cas spécifiques, procéder à une divulgation publique.

Quels types de signalements doivent être autorisés ?

Les signalements peuvent porter sur :

  • Un crime, un délit, une menace ou un préjudice pour l’intérêt général (ex. : risques pour la sécurité, la santé publique ou l’environnement).
  • Une violation ou une tentative de dissimulation d’une violation des lois et règlements français, du droit de l’Union européenne, d’un engagement international régulièrement ratifié ou approuvé par la France (ex. : la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, la Convention internationale des droits de l’enfant), ou d’un acte unilatéral d’une organisation internationale pris sur le fondement d’un tel engagement.

Dans les entreprises assujetties à l’obligation de mettre en place un programme de conformité anticorruption comprenant huit dispositifs obligatoires, dont le dispositif d’alerte interne, aux termes de La loi Sapin II (c’est-à-dire les entreprises employant au moins 500 salariés, ou appartenant à un groupe de sociétés dont la société mère a son siège social en France et dont l’effectif comprend au moins 500 salariés, et dont le chiffre d’affaires ou le chiffre d’affaires consolidé est supérieur à 100 millions d’euros, les « Entreprises assujetties à la Loi Sapin II »), les signalements peuvent également porter sur l’existence de comportements ou de situations contraires au code de conduite de l’entreprise.

Les faits, informations ou documents dont la divulgation est interdite par les lois et règlements relatifs au secret de la défense nationale, au secret médical, au secret des délibérations judiciaires, au secret de l’enquête ou de l’instruction judiciaire, et au secret professionnel de l’avocat, sont exclus du champ d’application du dispositif d’alerte. 

Le signalement anonyme doit-il être garanti ?

Le droit français n’impose pas explicitement le signalement anonyme, mais il l’autorise. Les entreprises doivent toutefois garantir la confidentialité et la protection de l’identité du lanceur d’alerte tout au long du processus.

En cas de non-respect, une peine de deux ans d’emprisonnement et une amende de 30 000 euros peuvent être encourues.

Qui doit pouvoir utiliser le dispositif d’alerte (uniquement les salariés ou également des tiers externes) ?

Le dispositif d’alerte interne doit être accessible :

  • Aux salariés, collaborateurs extérieurs et occasionnels, intérimaires, stagiaires, anciens salariés (dans la mesure où les informations ont été obtenues dans le cadre de leurs activités), candidats à l’embauche (dans la mesure où les informations ont été obtenues dans le cadre du processus de recrutement), actionnaires, membres de l’organe d’administration, de direction ou de surveillance de l’entité concernée ; et
  • Aux tiers externes, tels que les fournisseurs, sous-traitants et autres parties prenantes.

Un dispositif d’alerte centralisé est-il suffisant ou est-il nécessaire de mettre en place un dispositif distinct pour chaque filiale ?

La collecte et le traitement des signalements via un dispositif centralisé sont, en règle générale, acceptés, à condition toutefois qu’un tel dispositif soit accessible à l’ensemble des filiales et qu’il garantisse le respect des exigences légales applicables, y compris, le cas échéant, celles de chaque pays concerné.

Un dispositif d’alerte interne peut-il être géré par un prestataire externe (ex. : consultant) ?

Oui, les entreprises peuvent confier la gestion de leur dispositif d’alerte à un prestataire externe, tel qu’un consultant ou un prestataire spécialisé, sous réserve que la confidentialité et les exigences légales, notamment en matière de protection des données, soient respectées.

Existe-t-il des sanctions en cas de non-mise en place d’un dispositif d’alerte interne ?

Il n’existe pas de sanction spécifique pour l’absence de dispositif d’alerte interne.

Cependant, les entreprises assujetties à la Loi Sapin II peuvent théoriquement encourir des amendes pouvant atteindre 200 000 euros pour les personnes physiques (présidents, directeurs généraux, etc.) et 1 000 000 d’euros pour la personne morale elle-même, en cas de manquement plus large à leur obligation de mettre en place un programme de conformité anticorruption.

En outre, toute personne faisant obstacle à la transmission d’un signalement encourt une peine d’un an d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende.

Le non-respect de l’obligation de confidentialité relative à l’identité du lanceur d’alerte est également passible de sanctions (cf. ci-dessus).