La seconde loi de finance rectificative pour 2012 a été adoptée
Après deux semaines de débats houleux au parlement, le second projet de loi de finances rectificative pour 2012 a été voté définitivement le 31 juillet 2012. Il s’agit du premier volet des réformes fiscales annoncées par le nouveau gouvernement, la suite étant attendue à l’automne.
Cette loi est marquée par une volonté de rompre avec le précédent gouvernement tout en continuant à assainir les finances publiques de la France. Pour ce faire tous les acteurs économiques sont mis à contribution. Le présent article résume les principales mesures entrées en vigueur le 17 août.
Les mesures intéressant les particuliers et leurs rémunérations
a) Assujettissement des revenus fonciers et plus values immobilières des non-résidents aux prélèvements sociaux
A compter de 2012 les revenus fonciers et les plus values immobilières réalisés sur des biens situés en France par les particuliers non-résidents seront soumis aux prélèvements sociaux (avant seul l’impôt sur le revenu était dû). Jusqu’à présent, seules les personnes résidentes en France payaient les prélèvements sociaux sur ces revenus (ces prélèvements devaient servir à la diversification du financement de la protection sociale). Cela représente une taxation supplémentaire de 15.5% du revenu net.
Les autres revenus de capitaux de source française, dividendes, intérêts etc. continuent de ne pas être soumis en France aux prélèvements sociaux quand ils sont perçus par des non-résidents.
b) Alourdissement de la taxation des stock-options et des attributions gratuites d’actions
Le nouveau gouvernement avait d’abord parlé de supprimer immédiatement le régime favorable des stocks options et attributions gratuites d’actions avant d’alourdir la taxation de ceux-ci par deux mesures. D’une part, le taux de la contribution patronale est porté de 14 % à 30 % et la contribution à la charge du bénéficiaire est, quant à elle, portée de 8 % à 10 %; d’autre part le taux dérogatoire applicable aux attributions gratuites d’actions dont la valeur annuelle par salarié était inférieure à la moitié du plafond annuel de la sécurité sociale est supprimé.
c) Le taux du forfait social est relevé de 8 à 20%
Le nouveau taux de 20 % sera applicable aux gains et rémunérations qui sont à la fois exclus de l’assiette des cotisations de sécurité sociale et assujettis à la CSG. Ce relèvement du taux du forfait social s’applique aux gains et rémunérations versés à compter du 1er août 2012.
Les mesures qui touchent les entreprises
a) Création d’une taxe sur dividendes distribués
La loi de finances rectificative crée une contribution de 3 % sur les montants distribués par les sociétés ou organismes français ou étrangers passibles de l’IS en France. Ne sont toutefois pas concernés les organismes de placement collectif et les PME au sens de la législation communautaire (moins de 250 salariés et moins de 50 millions de chiffre d’affaires ou 43 millions de total bilan), et les distributions entre sociétés d’un même groupe fiscal ou d’un même groupe bancaire mutualiste ou encore d’un même groupe de SIIC.
Toutes les distributions à compter de la date de publication de la loi sont soumises à cette taxe, y compris les revenus simplement réputés distribués ; peuvent à titre d’exemple aussi être concernées les succursales françaises de sociétés étrangères.
b) Bénéfices provenant de sociétés établies dans un pays à fiscalité privilégiée
Le dispositif prévoyant que sont imposés en France les résultats des structures étrangères bénéficiant d’une fiscalité privilégiée et contrôlées par des entreprises françaises (CGI, art. 209 B) est renforcé : pour éviter son application, il incombe désormais à l’entreprise française d’établir que les opérations de la structure étrangère contrôlée ont principalement un effet et un objet autres que de permettre la localisation de bénéfices dans un État ou territoire où elle est soumise à un régime fiscal privilégié. Cette condition est réputée remplie notamment lorsque la structure a principalement une activité industrielle ou commerciale effective exercée sur le territoire de son établissement ou de son siège.
c) Non déductibilité des aides financières entre entreprises
Pour les exercices clos à compter du 4 juillet 2012, les aides de toute nature consenties par une entreprise à une autre ne sont plus déductibles des bénéfices de celle qui accorde l’aide. Seules restent déductibles les aides à caractère commercial, et les aides consenties à des entreprises soumises à une procédure collective. En contrepartie, les entreprises qui reçoivent ces aides pourront être dispensées sous certaines conditions d’ajouter ces aides à leurs bénéfices si elles s’engagent à augmenter leur capital à dû concurrence.
d) Limitation de la déductibilité des moins-values sur titres de participation cédés dans les deux ans d’un apport
Les entreprises qui constatent une moins-value lors de la cession, dans les deux ans de leur émission, de titres de participation reçus en rémunération d’un apport réalisé à compter du 19 juillet 2012 ne peuvent pas déduire de leur résultat imposable la part de cette moins-value qui correspond à la différence entre la valeur d’inscription en comptabilité des titres cédés, et la valeur réelle de ces titres à la date de leur émission.
e) Encadrement de la transmission de déficits
En France les déficits sont par principe reportables sur les déficits des années suivantes sans limitation de temps aussi longtemps que la société ne cesse pas son activité ou ne change pas d’activité.
Dans le nouveau texte, les conséquences de la cessation d’entreprise, en particulier la perte des déficits antérieurs, sont étendues aux disparitions des moyens de production. Et la notion de changement d’activité est précisée en fixant des critères objectifs pour l’adjonction ou l’abandon d’activité. Un agrément est toutefois créé pour éviter ces conséquences lorsque ces opérations ont un objectif principal autre que fiscal.
Par ailleurs, les conditions sont durcies pour accorder l’agrément autorisant le transfert des déficits en cas de restructuration (fusions et opérations assimilées), notamment dans les groupes fiscaux. Ces agréments ne sont accordés que si l’activité qui a généré les déficits n’a pas subi de changement significatif avant et après l’opération.
f) Institution de nouvelles mesures anti-abus contre les schémas de distribution suivie de la déduction d’une perte, d’une moins-value ou d’une provision
Les schémas de désinvestissement dits « coquillards » consistent pour une société mère à percevoir massivement, en provenance d’une filiale, des dividendes exonérés en application du régime mère-fille ou du régime de groupe, et à déduire une moins-value ou une provision au titre de la perte de valeur ou de la dépréciation de sa participation dans cette filiale.
Afin de lutter contre le développement de ces schémas, quatre mesures anti-abus, visant chacune un montage spécifique, sont adoptées :
- le régime fiscal mère-fille n’est désormais plus applicable aux produits des parts de sociétés immobilières inscrites en stock à l’actif de sociétés qui exercent une activité de marchand de biens ;
- les dividendes exonérés en application du régime mère-fille sont neutralisés pour le calcul de la moins-value de fusion ;
- les moins-values de cession de titres de sociétés de gestion de portefeuille ayant permis de bénéficier du régime mère-fille au cours de l’exercice et des cinq précédents relèvent désormais du régime de long terme ;
- en intégration fiscale, les dividendes neutralisés au niveau du résultat d’ensemble attachés aux titres, conservés pendant au moins deux ans, d’une société de gestion de portefeuille ultérieurement cédée ou absorbée sont réintégrés dans la moins-value.
g) Versement anticipé de la contribution exceptionnelle sur l’IS
Une contribution exceptionnelle de 5 % de l’impôt sur les sociétés est due par toutes sociétés ayant réalisé un chiffre d’affaires supérieur à 250 millions d’euros au titre d’un exercice clos pendant la période du 31 décembre 2012 au 30 décembre 2013. Les sociétés concernées paieront un acompte à la date prévue pour le paiement du dernier acompte d’IS de l’exercice en cours, soit le 15 décembre 2012 pour les entreprises dont l’exercice coïncide avec l’année civile. Cette taxe provisoire devrait en principe être appliquée la dernière fois pour l’exercice 2012.
3. Activités financières ou de placement collectif
a) Suppression de la retenue à la source sur les dividendes versés à des organismes de placement collectif étrangers
La retenue à la source sur les revenus distribués par des sociétés françaises est donc supprimée pour les organismes de placement collectif constitués sur le fondement d’un droit étranger situés dans un État membre de l’Union européenne ou dans un autre État ou territoire ayant conclu avec la France une convention d’assistance administrative en vue de lutter contre la fraude et l’évasion fiscales. La retenue en question a déjà été condamnée par la Cour de justice des communautés européennes par un arrêt Santander du 10 mai 2012 au motif qu’elle porte atteinte à la liberté de circulation des capitaux. Les organismes qui ont payés à tort cette retenue à la source peuvent donc en réclamer le remboursement pour les années passées.
b) Taxation des transactions financières
La taxe est due à compter du 1er août 2012 sur les acquisitions de titres de capital émis par une société dont le siège social est situé en France et dont la capitalisation boursière dépasse 1 milliard d’euros le 1er janvier de l’année d’imposition. C’est le prestataire qui reçoit directement de l’acquéreur final l’ordre d’achat, qui est redevable de la taxe ; celle-ci est perçue au taux de 0,2 % (au lieu du taux de 0,1 % initialement prévu).