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Publié le 1 avril 2013 par Soulier Avocats

Le contrat de génération : mode d’emploi

Annoncé et présenté comme outil primordial pour résoudre tout à la fois les difficultés rencontrées par les jeunes comme par les seniors en termes d’emploi, le contrat de génération est né de l’accord national interprofessionnel du 19 octobre 2012, retranscrit dans la loi n° 2013-185 du 1er mars 2013.

Le décret n° 2013-222 du 15 mars 2013 en a précisé le contenu, les pénalités et les aides financières. Nous en présentons les principales caractéristiques. 

PREAMBULE 

Le contrat de génération, opérationnel depuis le 17 mars 2013, est un dispositif visant à faciliter l’insertion durable des jeunes et à favoriser l’embauche et le maintien en emploi des « salariés âgés », le législateur ayant préféré cette locution au terme de seniors … Il est mis en œuvre de manière différenciée selon la taille de l’entreprise ou du groupe auquel elle appartient. Un rapide rappel de la notion de groupe peut donc être utile. 

Le groupe est défini à l’article L.2331-1 du Code du travail relatif au comité de groupe : «  groupe formé par une entreprise dominante dont le siège social est situé sur le territoire français, et les entreprises qu’elle contrôle dans les conditions définies à l’article L.233-1, aux I et II de l’article L.233-3 et à l’article L.233-16 du code du commerce. » 

Ce qui renvoie aux participations majoritaires (L.233-1), à la détention directe ou indirecte des droits de vote  et au pouvoir de nommer la majorité des membres des organes de direction (L.233-3) et à l’influence dominante (L.233-16). 

L’article L.2331-1 y ajoute qu’est considérée comme dominante une entreprise exerçant une influence dominante sur une entreprise dont elle détient au moins 10% du capital, lorsque la permanence et l’importance des relations de ces entreprises établissent l’appartenance de l’une et de l’autre à un même ensemble économique. 

1. LES ENTREPRISES CONCERNEES 

1.1 Celles qui ont une obligation et encourent des pénalités 

Les entreprises de 300 salariés et plus, et celles, quelle que soit leur taille, qui appartiennent à un groupe d’au moins 300 salariés, sont tenues d’être couvertes par un accord collectif ou à défaut par un plan d’action sur le contrat de génération, et ce sous peine de sanctions financières. 

Le seuil de 300 salariés pour les groupes tend donc à rendre le dispositif obligatoire à de petites structures affiliées à des groupes. 

1.2 Celles qui sont incitées à négocier 

Les entreprises dont l’effectif est compris entre 50 et moins de 300 salariés, ou appartenant à un groupe dont l’effectif n’atteint pas ces limites, n’ont pas l’obligation de mettre en place un tel dispositif mais elles y sont incitées par l’octroi d’une aide financière. 

1.3 Celles qui n’ont ni contrainte ni incitation

Les entreprises dont l’effectif est inférieur à 50 salariés et qui n’appartiennent pas à un groupe d’au moins 50 salariés n’ont ni obligation ni incitation. Elles bénéficient de l’aide dès lors qu’elles remplissent les conditions légales et réglementaires relatives à l’embauche des jeunes et au maintien des seniors. 

Par mesure de simplification, nous retiendrons dans l’exposé ci-après le seul terme d’ « entreprise » sans y accoler la mention « ou appartenant à un groupe ». 

2. LE DISPOSITIF OBLIGATOIRE DANS LES ENTREPRISES OU GROUPES D’AU MOINS 300 SALARIES 

2.1 Un diagnostic préalable

Il doit être établi par l’entreprise préalablement à la négociation et doit comporter :

  • La pyramide des âges,
  • Les caractéristiques des jeunes et des seniors et l’évolution de leur place au sein de l’entreprise au cours des trois dernières années ;
  • Les prévisions de départ à la retraite ;
  • Les perspectives de recrutements ;
  • Les compétences clés de l’entreprise ;
  • Les conditions de travail des salariés âgés et les situations de pénibilité. 

2.2 La négociation d’un accord collectif

Eu égard à l’objet du dispositif et aux compétences respectives du comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) et du comité d’entreprise (CE), ceux-ci devront être consultés concomitamment à l’ouverture de la négociation et en tout état de cause avant la signature de l’accord.

 L’accord pourra se négocier au niveau de l’entreprise ou au niveau du groupe. 

Les entreprises de moins de 200 salariés dépourvues de délégués syndicaux pourront, si elles le souhaitent, négocier avec les représentants du personnel élus en son sein dans les conditions prévues à l’article L.2232-21 du code du travail. 

Si l’entreprise est dépourvue de délégués syndicaux ou si les négociations engagées n’aboutissent pas et se concluent  par un procès-verbal de désaccord, l’entreprise pourra alors établir unilatéralement un plan d’action. 

2.3 Le contenu de l’accord collectif (ou du plan d’action)

L’accord collectif ou le plan d’action doit comporter : 

  • Les tranches d’âge des jeunes et des salariés âgés concernés par le dispositif ;
  • Les engagements de l’entreprise en termes de formation et d’insertion durable des jeunes, d’emploi des salariés âgés et de transmission des savoirs et compétences ;
  • Le calendrier prévisionnel ;
  • Les modalités de publicité de l’accord ou du plan ;
  • Les objectifs d’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes et de mixité des emplois ;
  • Les objectifs de lutte contre les discriminations. 

Les engagements en termes d’emploi (embauche ou maintien dans l’emploi) devront être chiffrés. 

2.4 Le contrôle de l’accord ou du plan

Les accords collectifs et les plans d’action font l’objet d’un contrôle de conformité par  la Direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi (DIRECCTE) dont les services disposent de 3 semaines pour exercer leur contrôle sur un accord collectif ou 6 semaines pour un plan d’action. 

2.5 Obligation de suivi annuel

Les entreprises ont en outre une obligation d’évaluation annuelle de la mise en œuvre de leur accord ou de leur plan. Cette évaluation doit être adressée chaque année à la DIRECCTE et comporter un certain nombre d’informations obligatoires. 

A défaut, les entreprises s’exposent à une pénalité de 1.500 euros. 

2.6 Sanction pour défaut d’accord ou de plan d’action

Les entreprises d’au moins 300 salariés qui n’auront ni conclu d’accord collectif ni élaboré un plan d’action au 30 septembre 2013 s’exposent a une pénalité financière si elles ne régularisent pas leur situation après mise en demeure de la DIRECCTE. Il en sera de même pour les accords et plans non conformes. 

La DIRECCTE fixera le taux de la pénalité, plafonné à 1% des rémunérations brutes versées pendant la période pendant laquelle l’entreprise n’est pas couverte par un accord ou un plan d’action ou, si le montant est plus élevé, à 10% du montant de la réduction Fillion appliquée aux salaires versés au cours de ladite période. 

La pénalité applicable en cas d’absence d’accord ou de plan d’action relatif à l’emploi des seniors est quant à elle supprimée. 

3. LES AIDES FINANCIERES  

Les aides de l’Etat sont accessibles aux entreprises de 50 à moins de 300 salariés couvertes par un accord ou un plan d’action et aux entreprises de moins de 50 salariés, même sans accord ou plan. 

Ces entreprises pourront être couvertes par accord collectif, par un plan d’action ou par un accord de branche étendu. 

3.1 Conditions d’octroi de l’aide

L’aide est attribuée pour chaque binôme de salariés constitué par l’embauche d’un jeune de moins de 26 ans (30 ans si handicapé), sous contrat à durée indéterminée à temps plein (ou par dérogation à un minimum de 80%), et le maintien dans l’emploi d’un senior pendant la durée de l’aide ou jusqu’à son départ en retraite.

Est considéré comme senior le salarié âgé d’au moins 57 ans, le salarié âgé d’au moins 55 ans au moment de son embauche ou le salarié handicapé d’au moins 55 ans. 

L’aide ne peut être accordée si l’entreprise a procédé:

  • à des licenciements économiques dans les 6 mois précédant l’embauche du jeune ;
  • à une rupture conventionnelle homologuée sur le poste visé par l’embauche ;
  • à un licenciement pour un motif autre que la faute grave ou lourde ou l’inaptitude au titre de ce même poste. 

L’entreprise devra également être à jour de ses obligations déclaratives et de paiement de ses cotisations. 

3.2 Montant de l’aide

Le montant de l’aide est de 4.000 euros par an et par binôme, à raison de 2.000 euros au titre de l’embauche du jeune et 2.000 euros au titre du maintien dans l’emploi du salarié âgé. 

L’entreprise bénéficie de l’aide pendant 3 ans à compter du premier jour d’exécution du contrat de travail du jeune. L’aide est versée trimestriellement, au terme de chaque trimestre civil. 

La demande d’aide doit être déposée dans les trois mois de cette embauche auprès de Pôle Emploi. Le formulaire de demande de l’aide est téléchargeable sur le site dédié : www.contrat-generation.gouv.fr/ 

L’aide sera interrompue en cas de rupture du contrat de travail du jeune, ou en cas de rupture du contrat de travail du salarié âgé dans les 6 mois suivant l’embauche du jeune, ou au delà de ces 6 premiers mois, en cas de rupture du contrat de travail du salarié âgé pour un motif autre que le licenciement pour faute grave ou lourde, ou pour inaptitude ou par rupture conventionnelle.