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Publié le 25 février 2015 par Soulier Avocats

Les frais d’avocats payés par l’entreprise pour la défense du salarié poursuivi pour des faits relatifs à l’exercice de ses fonctions : frais d’entreprise ou dépense personnelle du salarié soumise à cotisations ?

La Cour de Cassation a posé le principe d’une obligation de protection juridique du salarié dans un arrêt du 18 octobre 2006, n° 04-48.612, à la charge de l’employeur, dès lors que le salarié avait dû assurer sa défense à un contentieux dont l’objet était lié à l’exercice de ses fonctions.

De notre fait, elle aura sans doute bientôt à se prononcer précisément sur le régime social applicable à de telles dépenses. 

Lors d’un contrôle chez l’un de nos clients, l’URSSAF a opéré un redressement au titre des sommes versées par l’entreprise aux avocats américains de deux salariés impliqués dans une affaire d’entente illicite,  considérant qu’il s’agissait de dépenses personnelles des salariés, et donc, à ce titre, soumises à cotisations sociales.  

Dans le communiqué publié en commentaire de son arrêt du 18 octobre 2006, la Cour de Cassation précisait : « la chambre sociale fonde sa décision sur ce texte [l’article 1135 du code civil(1)] dont elle déduit que l’employeur, qui est investi par la loi du pouvoir de direction et de contrôle des salariés placés sous sa subordination juridique, est tenu de garantir ceux-ci à raison des actes ou faits qu’ils passent ou accomplissent en exécution du contrat de travail. Elle décide en conséquence que le salarié doit être indemnisé des frais et dépenses qu’il a engagés pour sa défense dans un contentieux dont l’objet est lié à l’exercice de ses fonctions. »

Dans le cas d’espèce, le salarié avait bénéficié d’un non-lieu. 

Dans le cas de notre client, la particularité – outre le montant colossal des honoraires des avocats des salariés – était le plaider-coupable des deux salariés, condamnés à une peine de prison et à une amende, dont ils se sont acquittés personnellement. L’entreprise étant de fait co-auteur de l’infraction, elle devait pour assurer sa propre défense, faire en sorte que ses deux salariés soient défendus dans les meilleures conditions, ce qui impliquait de prendre en charge les frais de leurs conseils, distincts de ses propres avocats. 

L’entreprise ayant contesté le redressement, elle a dû porter l’affaire devant le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale (TASS), puis devant la Cour d’appel. 

L’URSSAF a mis en avant divers arguments en vue de justifier la qualification de dépense personnelle de ces frais d’avocats : type de dépense non répertorié par l’arrêté du 20 décembre 2002 visant les frais professionnels, faits à l’origine des dépenses contraires à l’intérêt de l’entreprise car contraires à la loi, infraction commise intentionnellement et donc détachables de l’exercice des fonctions, etc. 

Nos arguments visant à faire reconnaître la prise en charge des frais d’avocats des salariés comme des frais d’entreprise – et de ce fait non soumis à cotisations – ont cependant bien été entendus d’abord par le TASS, puis confirmés par la Cour d’appel le 10 février 2015. 

Selon ce qui nous a été annoncé, l’URSSAF devrait se pourvoir en cassation. Nous aurons ainsi une position précise de la chambre sociale, en souhaitant qu’elle confirme notre approche. 

 1. Art. 1135 du code civil : « Les conventions obligent non seulement à ce qui y est exprimé, mais encore à toute les suites que l’équité, l’usage ou la loi donnent à l’obligation d’après sa nature. »