Prorogation en 2023 de l’abaissement du seuil déclenchant le contrôle des investissements étrangers en France aux fins de protection des sociétés françaises cotées exerçant des activités sensibles
Bruno Le Maire, ministre de l’Economie, des Finances, de la Souveraineté Industrielle et Numérique, et Olivier Becht, ministre délégué auprès de la ministre de l’Europe et des Affaires étrangères, chargé du Commerce extérieur, de l’Attractivité et des Français de l’étranger, ont annoncé dans un communiqué en date du 22 décembre 2022[1] que la mesure temporaire d’abaissement du seuil de détention des droits de vote dans les entreprises françaises cotées déclenchant le contrôle des investissements étrangers en France serait prorogée jusqu’au 31 décembre 2023.
Par principe, les relations financières entre la France et l’étranger sont libres[2]. De manière dérogatoire cependant, les articles L.151-3 s. et R.151-1 s. du Code monétaire et financier soumettent certains investissements réalisés en France, y compris par des entreprises de droit français ou des personnes de nationalité française, à autorisation administrative et assortissent le non-respect de la réglementation sur les investissements étrangers de lourdes sanctions.
Pour rappel, sont soumis à autorisation préalable du ministre chargé de l’économie les investissements étrangers dans une activité en France qui, même à titre occasionnel, participe à l’exercice de l’autorité publique ou relève de l’un des domaines suivants :
- Activités de nature à porter atteinte à l’ordre public, à la sécurité publique ou aux intérêts de la défense nationale ;
- Activités de recherche, de production ou de commercialisation d’armes, de munitions, de poudres et substances explosives[3].
Le contrôle des investissements étrangers dans ces domaines d’activité a été largement renforcé ces dernières années, et ce tout particulièrement depuis la crise sanitaire liée à l’émergence et la propagation du coronavirus (voir notamment nos précédents articles sur ce même sujet[4]).
Par décret du 22 juillet 2020[5], le seuil d’acquisition des droits de vote susceptible de déclencher la procédure de contrôle des investissements étrangers dans les sociétés françaises cotées a été abaissé de 25% à 10% des droits de vote.
Cet abaissement a été prorogé une première fois pour une durée d’application du 22 juillet 2020 au 31 janvier 2021[6], puis a été reconduit jusqu’au 31 décembre 2022[7].
Bruno Le Maire, ministre de l’Economie, des Finances, de la Souveraineté Industrielle et Numérique, et Olivier Becht, ministre délégué auprès de la ministre de l’Europe et des Affaires étrangères, chargé du Commerce extérieur, de l’Attractivité et des Français de l’étranger, ont annoncé dans un communiqué en date du 22 décembre 2022[8] que la mesure temporaire d’abaissement du seuil de détention des droits de vote dans les entreprises françaises cotées déclenchant le contrôle des investissements étrangers en France serait prorogée jusqu’au 31 décembre 2023.
Le contexte économique actuel en lien avec la crise énergétique ne permettant pas d’écarter les risques sur ces entreprises, Bruno Le Maire et Olivier Becht estiment qu’il est, en effet, essentiel d’assurer la continuité de la protection de ces entreprises. Les ministres ont donc demandé à ce que cette mesure temporaire d’abaissement du seuil, qui devait prendre fin au 31 décembre 2022, soit maintenue jusqu’au 31 décembre 2023.
A noter que les modalités de la mesure d’abaissement du seuil déclenchant le contrôle sont inchangées :
- elle ne concerne pas les investisseurs issus d’un Etat membre de l’Union européenne ou d’un Etat partie à l’accord sur l’Espace économique européen ;
- elle ne porte que sur les investissements réalisés au sein des sociétés cotées sur un marché réglementé ;
- elle s’exerce selon une procédure accélérée : l’investisseur étranger franchissant le seuil de 10% des droits de vote le notifie à la direction générale du Trésor. Le ministre de l’Economie, des Finances, de la Souveraineté Industrielle et Numérique dispose alors de 10 jours pour décider si l’opération doit être soumise à un examen plus approfondi, sur la base d’une demande d’autorisation complète.
Dans le contexte d’une conjoncture économique fragilisée, la question du contrôle des investissements étrangers reste éminemment sensible. En témoigne la question écrite posée par le sénateur de Loire-Atlantique, Yannick Vaugrenard, au ministre de l’Economie[9] publiée le 27 octobre 2022. Le sénateur y faisait part de son inquiétude quant au projet d’achat d’Exxelia, société industrielle française spécialiste des composants pour l’aviation militaire et l’industrie spatiale européenne, par le groupe américain d’électronique et de défense Heico et rappelait l’applicabilité de la procédure de contrôle des investissements étrangers. L’acquisition d’Exxelia par Heico aura finalement eu lieu début janvier 2023.
[1] Communiqué de presse du 22 décembre 2022 n°458, « prorogation en 2023 de la mesure d’abaissement temporaire du seuil déclenchant le contrôle IEF dans les sociétés françaises cotées sur un marché réglementé ».
[2] Article L.151-1, al. 1 du Code monétaire et financier.
[3] Article L.151-3 du Code monétaire et financier.
[4] Voir les articles intitulés Le filtrage des investissements directs étrangers par l’Union européenne, Contrôle des investissements étrangers en France : entre renforcement et plus grande lisibilité pour les investisseurs, et Nouvelle prorogation jusqu’au 31 décembre 2022 des mesures d’adaptation du contrôle des investissements étrangers en France pendant la crise sanitaire publiés sur notre Blog le 12 septembre 2019, le 28 février 2020 et le 28 janvier 2022.
[5] Décret n° 2020-892 du 22 juillet 2020 relatif à l’abaissement temporaire du seuil de contrôle des investissements étrangers dans les sociétés françaises dont les actions sont admises aux négociations sur un marché réglementé.
[6] Décret n° 2020-1729 du 28 décembre 2020 modifiant le décret n° 2020-892 du 22 juillet 2020.
[7] Décret n° 2021-1758 du 22 décembre 2021 prorogeant l’abaissement temporaire du seuil de contrôle des investissements étrangers dans les sociétés françaises dont les actions sont admises aux négociations sur un marché réglementé.
[8] Communiqué de presse du 22 décembre 2022 n°458, « prorogation en 2023 de la mesure d’abaissement temporaire du seuil déclenchant le contrôle IEF dans les sociétés françaises cotées sur un marché réglementé ».
[9] Question écrite n° 03449 de M. Yannick Vaugrenard (Loire-Atlantique – SER) publiée dans le JO Sénat du 27/10/2022 – page 5245