La réponse du Ministère de la Justice face à la vague d’opposition contre le barème Macron
Le Ministère de la Justice n’est pas resté inactif face à la résistance des juges contre le barème Macron. Par une circulaire datant du 26 février 2019, le Ministère de la Justice demande aux procureurs généraux près les cours d’appel, de l’informer des décisions rendues concernant l’inconventionnalité du barème Macron.
Comme nous l’avions expliqué dans un article précédent du mois de janvier 2019[1], le juge est désormais tenu en application du barème d’indemnisation des licenciements sans cause réelle et sérieuse instauré à l’article L.1235-3 du Code du travail, d’octroyer des dommages et intérêts dont le montant est compris entre des minima et des maxima déterminés en fonction de l’ancienneté du salarié et de la taille de l’entreprise. C’est à ce système de barème des indemnités que de nombreux conseils de prud’hommes se sont récemment opposés en invoquant notamment son inconventionnalité. Ces conseils de prud’hommes estiment que l’application de ce barème ne leur permet pas d’attribuer aux salariés une indemnisation adéquate conformément à l’article 10 de la Convention n°158 de l’Organisation Internationale du Travail (« OIT ») et l’article 24 de la Charte sociale européenne. Le nombre de décisions prud’homales adoptant cette position et écartant l’application du barème s’est ainsi multiplié depuis plusieurs mois.
Face à cette vague d’opposition, le Ministère de la Justice a communiqué aux procureurs généraux près les cours d’appel, une circulaire datant du 26 février 2019, par laquelle il rappelle avant tout que le barème a été soumis au Conseil d’Etat et au Conseil Constitutionnel.
Il explique ainsi que « certaines juridictions ont estimé, en dépit de la décision du Conseil d’Etat qui écarte explicitement ce moyen, que l’article L. 1235-3 du code du travail méconnaissait l’article 10 de la Convention 158 de l’OIT et l’article 24 de la charte sociale européenne. D’autres juridictions ont, au contraire, écarté, conformément à la jurisprudence du Conseil d’Etat, l’inconventionnalité de ce moyen».
Par le biais de cette circulaire, le Ministère de la Justice demande donc à être informé des décisions rendues qui écartent le moyen lié à l’inconventionnalité du barème ainsi que des décisions qui, au contraire, reconnaissent son inconventionnalité.
Il demande également aux procureurs généraux de se faire communiquer les décisions ayant fait l’objet d’un appel afin de faire connaître l’avis du parquet général sur cette question.
Certains estiment que cette circulaire est un véritable moyen de pression de la part du Ministère sur les juridictions.
Reste à voir quelle sera la réaction des juridictions.
En tout état de cause, nous attendons toujours avec impatience les premières décisions des cours d’appel, et surtout de la Cour de cassation, sur la conventionnalité ou non du barème Macron et invitons à rester vigilant lors de l’application du barème pour l’estimation du risque lié à un potentiel licenciement sans cause réelle et sérieuse.
[1]Cf. article intitulé La résistance des juges face au barème Macron