Statut légal des agents commerciaux : période d’essai contractuelle et indemnité de cessation de contrat
Le statut légal des agents commerciaux prévoit notamment que l’agent commercial a droit, sauf exceptions spécifiques, à une indemnité compensatrice en réparation du préjudice subi en cas de cessation de ses relations avec le mandant.
Par un arrêt du 23 juin 2015, la Cour de cassation est venue rappeler que ce statut, qui suppose pour son application que la convention soit définitivement conclue entre les parties, n’interdit pas la stipulation d’une période d’essai et que l’indemnité légale de cessation de contrat n’est pas due à l’agent commercial lorsqu’il est mis fin au contrat avant l’expiration de cette période d’essai.
En l’espèce, un contrat d’agent commercial prévoyant une période d’essai de huit mois a été résilié par le mandant avant l’expiration de cette période. Le mandant s’opposant au règlement de l’indemnité légale de cessation de contrat au motif que la rupture avait eu lieu pendant la période d’essai contractuelle, l’agent commercial l’a assigné en paiement de cette indemnité.
Les juges d’appel ont fait droit aux demandes de l’agent commercial et condamné le mandant au paiement de l’indemnité compensatrice prévue par les dispositions du Code de commerce relatives au statut des agents commerciaux. Ils ont en particulier retenu que les articles L. 134-12 et L. 134-13 du Code de commerce, d’ordre public, prévoient le versement d’une indemnité lors de la rupture du contrat d’agent commercial et les cas dans lesquels cette réparation n’est pas due, de sorte qu’à supposer que la stipulation d’une période d’essai dans un tel contrat ne soit pas en elle-même illicite, celle-ci ne peut avoir pour effet de priver l’agent commercial de son droit à indemnité.
L’arrêt de la Cour d’appel est cassé au visa des articles 1134 (qui rappelle notamment le principe de liberté contractuelle) et 1184 (qui renvoie aux actions dont dispose la partie contractante à l’encontre de celle qui n’a pas exécuté son obligation) du Code civil : aux termes de son arrêt du 23 juin 2015, la Cour de cassation affirme que « le statut des agents commerciaux, qui suppose pour son application que la convention soit définitivement conclue, n’interdit pas une période d’essai »[1].
Il ressort en premier lieu de cet arrêt que les parties peuvent librement prévoir dans un contrat d’agent commercial une période d’essai pendant laquelle chacune d’entre elles disposerait d’un droit de résiliation unilatérale.
En second lieux, la Cour de cassation confirme que l’indemnité légale de cessation de contrat n’est pas due à l’agent commercial lorsqu’il est mis fin au contrat avant l’expiration de cette période d’essai dans la mesure où le statut légal des agents commerciaux suppose pour son application que le contrat ait été définitivement conclu entre les parties.
La solution retenue par la Cour de cassation dans cet arrêt n’est pas nouvelle. Elle confirme en effet ici sa position adoptée dans un arrêt du 17 juillet 2001[2]. Cet arrêt du 23 juin 2015 devrait cependant mettre fin aux débats suscités par certaines décisions de juges du fond qui avaient semble-t-il adopté une position contraire[3].
Enfin, on notera que si elle n’est pas illégitime en soi, une clause de période d’essai stipulée dans un contrat d’agent commercial doit cependant prévoir une durée raisonnable afin de ne pas contrevenir aux dispositions d’ordre public relatives à l’indemnité compensatrice de l’agent commercial. Une clause prévoyant une période d’essai excessive devrait en effet être réputée non écrite.
[1] Cass. com, 23 juin 2015, n°14-17.894
[2] Cass. com, 17 juillet 2001, n°97-17.539
[3] Cf. notamment Cour d’appel de Paris, 6 septembre 2012, n°10/16975 : il ressort de cet arrêt que la Cour d’appel de Paris a considéré qu’une clause qui permettrait au mandant de rompre sans indemnité le contrat au cours d’une période d’essai doit être réputée non écrite.